La Théorie PolyVagale est une façon de comprendre notre système nerveux avec des sentiments de sécurité, de danger et de menace mortelle, et comment cela impacte nos états.
C’est la science de la connexion, de l’attachement, de la communication, des émotions, de l’autorégulation mais ce n’est pas un protocole.

Jan Winhall a fourni un protocole avec son « Felt Sense Polyvagal Model » pour traiter les traumatismes et les addictions (mais pas que).
C’est une manière étape par étape et visuelle de rendre la Théorie PolyVagale pratique et de présenter la Théorie PolyVagale à nos clients, leur permettant de se connecter à leur corps, de comprendre la dépendance et l’addiction, et de revenir à la sécurité.

J’ai l’immense plaisir d’accueillir Jan Winhall dans une interview (ma première interview en anglais, désolée pour mon accent).
Nous n’allons pas détailler les fondamentaux de la Théorie PolyVagale, donc si tu découvres la TPV seulement maintenant je te recommande d’abord cet article.

LIRE CET ARTICLE EN ANGLAIS

Jan Winhall nous présentera son Felt Sense PolyVagal Model, nous parlerons d’addiction, de ressenti « felt sense » et de concentration « focusing », de workaholisme (team burn-out 😉 ), de ses magnifiques modèles graphiques, d’états mélangés et d’encore plus d’outils… c’est parti pour une interview efferveSciente !
(il y a des sous-titres en français sur cette vidéo, clique sur sous-titres en bas à droite et sélectionne « français »… et on ne se moque pas de mon accent !)

 
Pour explorer et télécharger les ressources de Jan Winhall RDV sur son site
Pour rejoindre la communauté du PolyVagal Institute, où Jan est très active
Et pour les visuels en français, c’est un peu plus bas dans l’article 😉 

 

J’ai découvert l’univers de Jan Winhall lors du dernier sommet Quantum Way, où j’ai eu le plaisir de sketchnoter sa conférence : non seulement son approche est pratique, mais elle est aussi visuelle ! Et tu sais à quel point j’aime rendre les choses visuelles, en particulier la Théorie PolyVagale !

La conférence de Jan Winhall au dernier sommet Quantum Way : ma sketchnote

Je suis vraiment ravie que Jan ait accepté de présenter son modèle dans une interview, et qu’elle m’ait permis de traduire ses modèles graphiques en français pour le public francophone (merci encore !).

Mais qu’est-ce que le modèle polyvagal Felt Sense ? Et que sont ses modèles graphiques ?
Il est temps de plonger dans l’univers de Jan Winhall !

Le modèle Felt Sense Polyvagal du trauma et de l’addiction

Jan Winhall est psychothérapeute, elle a été assistante sociale, et elle a développé le « Felt Sense Polyvagal Model » en mêlant le Felt Sense Experience qu’elle a créé et la Théorie PolyVagale de Stephen Porges.

L’approche de Jan met l’accent sur l’écoute des patients, en particulier les survivants de traumatismes, avec des « oreilles dépathologisantes », en croisant les travaux de Judith Herman et de Stephen Porges qui décrivent les traumatismes et les conduites addictives comme des processus adaptatifs.
Les comportements adaptatifs vont du débordement sympathique à l’engourdissement dorsal, et ces addictions, et comportements d’automutilation, ont pour fonction de faire passer les gens d’un état autonome à l’autre, comme le décrit Stephen Porges.

« Nous dépathologisons la dépendance et la comprenons comme une stratégie de régulation de nos états. »
Jan Winhall

C’est un vrai changement de paradigme : on ne parle plus de pathologie, on parle de la sagesse du corps à s’adapter à différentes situations pour survivre.
Comme d’habitude, la Théorie PolyVagale est très déculpabilisante, explorant et décrivant l’adaptation au lieu de la pathologie.
Mais il peut y avoir des troubles de l’adaptation et des personnes peut se retrouver coincées dans des routines, des boucles de rétroaction traumatiques où nous pouvons rester coincés dans la dépendance et l’addiction.

A ce sujet, qu’est-ce qu’une addiction ?

Jan Winhall présente une définition en trois étapes des dépendances :

  1. Elles nous aident au début
  2. Elles finiront par nous faire du mal à long terme
  3. Nous ne pouvons pas arrêter de les faire

Ça marche avec l’abus d’alcool ou de drogue… mais aussi avec le travail, et le workaholisme est un vrai sujet quand on parle de burnout…
Nous pouvons nous gaver de travail, avec de grands projets qui prennent tout notre temps, de la même manière que nous nous remplir avec l’alcoolisme.

Le Felt Sense PolyVagal Model est un moyen de se reconnecter à nos corps, qui sont vraiment laissés pour compte dans nos cultures.
Il mélange le « Felt Sense » d’Eugene Gendlin et la neuroception et l’intéroception de Stephen Porges.

Le Felt Sense, la neuroception et l’intéroception sont des moyens d’observer et de comprendre comment les changements se produisent dans nos corps, les changements d’état comme nous les observons dans la Théorie PolyVagale.

Le but est de se sentir suffisamment en sécurité pour ralentir et observer ce qui se passe dans notre corps, avec un processus appelé Focusing : « Qu’est-ce qui se passe en moi maintenant ? »
C’est une invitation à écouter le « ressenti », une forme d’intuition, l’émergence d’une idée, est c’est lié à la neuroception : à quel point te sens-tu en sécurité ? Dans quel es-tu ?
Et au final on peut observer des « changements ressentis » ou « felt shifts », des changements d’état.

Le Felt Sense PolyVagal Model est un moyen de comprendre et d’observer les ressentis et les changements d’états… ce qui signifie qu’il faut connaître ses états… et c’est là qu’interviennent les modèles graphiques !

 

Théorie PolyVagale illustrée : les modèles graphiques

Jan Winhall a mis à disposition deux modèles graphiques pour son « Felt Sense Polyvagal Model », en commençant par celui des praticiens (et je la remercie encore de m’avoir autorisée à te les traduire)

Télécharger les traductions françaises en haute définition

J’aime BEAUCOUP ce modèle très visuel, mais la plupart des clients le trouvent trop difficile, aussi Jan et ses clients et étudiants ont proposé un modèle pour les clients, les 6Fs : 

Télécharger les traductions françaises en haute définition
Pour télécharger les versions sources originales RDV sur le site web de Jan WInhall, avec d’autres outils en bonus

C’est une invitation à reconnaître et à décrire où l’on se situe sur ces modèles graphiques, c’est simple, et c’est visuel : les gens peuvent l’imprimer et le mettre sur leur mur ou frigo, ça peut être un moyen de communiquer comment on se sent et quels sont nos besoins … brillant!

Et pour ceux qui sont plus habitués à « mes » triforces (même si on a le triangle en commun pour les états, juste mon ventral est au-dessus), voici à quoi ressemblerait le modèle de Jan en « version triforce » :

Le modèle de Jan en version triforce

Les 6Fs des clients de Jan en version triforce

Tu peux retrouver ces schémas dans leur version originale en anglais, ainsi que mes triforces en anglais, dans cet article.
Et si tu veux utiliser ces modèles dans ta pratique tu peux télécharger les versions françaises haute définition ici, ou bien les versions anglaises de Jan sur son site web 🙂 

Le but du jeu est d’identifier où tu te situes sur le modèle, et trouver de quoi tu as besoin pour aller vers un état vagal ventral plus connecté et plus ancré.
Et il y a des TAS de pratiques à explorer, de la respiration à la reconnexion au corps pour aller vers un état plus centré.

 

Une trilogie d’états… et plus encore

Dans le modèle de Jan, il y a trois états mélangés : amusant et enflammé, c’est pour le jeu, un mélange de ventral et de sympathique (Porges parle beaucoup du jeu dans ses livres), et deux autres qui sont vraiment nouveaux et que j’aimerais explorer ici.

Tout d’abord Jan décrit « l’état figé » ou « freeze state » comme un mélange d’immobilisation dorsale ET de mobilisation sympathique, expliquant que cet état mixte joue un rôle important dans l’addiction : c’est vraiment nouveau, et j’ai personnellement toujours pensé que l’état « figé » n’était que dorsal au début… Jan aussi, et je suis rassurée de voir que je n’étais pas la seule à me tromper 🙂

En fait nous avons toutes les deux découvert que « l’état figé » était un état mixte grâce aux travaux de l’Institut PolyVagal, et notamment en ce qui me concerne avec CE visuel :

PolyVagal Institute’s blended states

Ou pour une version modernisée, croisée avec le modèle de Jan Winhall :

Lorsque l’on observe le corps, l’état figé est resserré, tendu, c’est un mélange d’immobilisation dorsale et de tension sympathique ! (taddaaa !)
Et donc je me suis trompée, ou du moins je n’était pas tout a fait exacte dans mon livre (à ma décharge je n’avais pas d’Institut PolyVagal pour relire ce que j’écrivais, et c’était en français donc…)

Et dans une version triforce ça ressemble à ça :

Dans la dépendance, nous faisons des allers-retours entre la montée en sympathique et la fermeture en dorsal, dans une boucle de rétroaction traumatique.
Les personnes dépendantes sont coincées dans cette boucle de rétroaction traumatique, utilisant des comportements ou des substances pour passer d’un état à un autre.
Encore une fois : c’est un comportement adaptatif, pas une maladie.

Au final, les personnes auront besoin d’arrêter leurs conduites addictives pour revenir au ventral où tout est fluide et où nous n’avons pas besoin d’addiction pour passer d’un état à un autre, pour nous adapter aux relations et à l’environnement.

« Nous n’avons pas besoin d’addiction en ventral. »
Jan Winhall

Il y a aussi un « état de flow » dans le modèle graphique des 6Fs de Jan, et c’est un mélange de réponse ventrale et dorsale.
En fait, ici, nous devons penser à l’état de flow comme un état d’immobilité, de sécurité et de confiance (Porges parle d' »immobilité »/ »stillness »).
C’est quand nous nous sentons suffisamment en sécurité pour être immobiles, comme pour les câlins, les rapports sexuels ou l’allaitement.

Cela m’a surpris car je pensais qu’il fallait un élan sympathique pour entrer dans un « état de flow », cet état de maîtrise où tout semble facile et sans effort, mais ce n’est en fait pas la même utilisation du terme « flow » ici. Les travaux de Mihály Csíkszentmihályi sur le flow, tel que décrit par les artistes ou les sportifs qui performent, est plus actif et a besoin d’un peu de sympathique, et de beaucoup de ventral, comme illustré dans mon article sur le POWER du flow 🙂

 

La TPV en pratique : les outils de Jan

Il y a beaucoup de ressources sur le site de Jan Winhall : son article co-écrit avec Stephen Porges, sur comment le Felt Sense PolyVagal Model a révolutionné le traitement de l’addiction, les modèles graphiques dont nous avons parlé (et que j’ai traduits en français ici) mais aussi des Body Cards (ou cartes corporelles) pour représenter ce que nous ressentons et la pratique des Quatre Cercles.

Voici un exemple de cartes corporelles à compléter, une version « ami.e des arbres » où tu peux mettre les trois états sur une seule page (choisis la silhouette qui te parle le plus)

Version « fine » (ou femme ?)
Version large (ou homme ?)

Un aperçu de mes états :

Toutes les fiches outils sont téléchargeables gratuitement sur le site de Jan, mais il est préférable d’apprendre à utiliser ces outils dans nos pratiques et accompagnements, et cela commence par les utiliser pour nous-mêmes.

Tous ces outils sont décrits, avec des exemples, dans l’article de Stephen Porges et Jan Winhall, mais tu peux également t’inscrire à l’une des formations et/ou cours en ligne de Jan pour approfondir son approche, et faire découvrir ces outils à tes clients. , si tu es clinicien, coach ou thérapeute 🙂

Vous pouvez également demander l’accès au groupe « Felt Sense Polyvagal Approach to Trauma » de Jan dans la communauté de l’Institut PolyVagal pour le partage de ressources et l’inspiration mensuelle !

Et nous les Français espérons que le premier livre de Jan sera disponible en français un jour, ou qu’un de ses cours en ligne sera traduit par Quantum Way(tu peux déjà t’inscrire à la masterclass de Jan en septembre)

Et bien sûr tu es invité.e à imprimer l’un ou l’autre des modèles graphiques de Jan pour apprendre à reconnaître et jouer avec tes états !