La différence est un continuum… où j’ai tendance à faire peur.

On m’a récemment reproché de trop parler de différence et de neuroatypie dans mes partages, au point de nuire à mon propos de stress-défense et de sensibilisation au burn-out, et bien… parlons-en.

Parlons de neuroatypie et de différence, explorons ensemble ce qui se cache derrière la neurodiversité, et de l’impact du décalage sur nos vies et sur notre énergie. Ca tombe bien, je devais proposer un sujet à Alban Bourdy pour la Quinzaine de la Sensibilité : voilà une bonne raison d’explorer le sujet !

Si tu veux voir tout de suite les résultats de mes recherches, tu peux regarder le replay de ma conférence (il est accessible en permanence et gratuitement, je te mets la vidéo juste en-dessous)
Son thème : le continuum de la différence, du léger filtre au gouffre. 


J’avais annoncé 1h20 sur le déroulé de mon support… j’ai fait 1h20 ! Je m’impressionne des fois… prévois quand même une boisson chaude.
N’hésite pas à explorer les autres vidéos de la chaîne – les replays de la Quinzaine (et des précédentes éditions) sont dans « en direct« 

Pour celles et ceux qui ont déjà vu la conférence, et qui souhaitent en retrouver les principaux éléments, et pour toi qui me lis, reprenons notre réflexion.
L’article est comme d’habitude assez long mais il est visuels (les visuels du support), aussi tu peux joyeusement diagonaliser entre les titres et les visuels 🙂 

La personne qui m’a interpellée sur mon focus (trop ?) appuyé sur le rôle de la neuroatypie dans l’épuisement me soutenait qu’il n’y avait pas réellement de différence entre un « normopensant » et un « HPI », et ce n’est potentiellement pas faux pour certains profils à haut potentiel, mais c’est une vision très restreinte de ce que recouvrent la neuroatypie et la neurodiversité🧐

Revenons (rapidement) aux sources.

 

Des nuances de différence(s)

Nous avions exploré avec l’aide illustrée de mon amie Ici Odette, « petite ode à la joie et à la liberté d’être soi », ce que recouvrait la « différence invisible » des profils neuroatypiques dans un précédent article de sensibilisation haut en couleurs

L’idée était d’offrir un panorama des profils dits « neuroatypiques », et de comment chaque différence impactait le quotidien (avec plein d’extraits vidéos), ce qui illustrait déjà bien cette notion de « décalage » liés à nos perceptions & fonctionnements différents, qui varie selon les profils.

Reprenons rapidement les cinq profils représentatifs de la neurodiversité, de façon visuelle et synthétique (merci Odette), sachant que les deux premiers sont des fonctionnements caractéristiques (on parlera plus de « neurodiversité » que de « neuroatypies ») tandis que les trois derniers sont des troubles neurodéveloppementaux (et on parlera plus facilement de « neuroatypie » ici).

Dans la grande famille de la neurodiversité, j’appelle…

La haute sensibilité

Puisque je décortique ce sujet à l’occasion de la Quinzaine de la Sensibilité, commençons par nos amis « hypersensibles », ou plutôt « hautement sensibles » ou « ultrasensibles » (termes plus justes et préférés par les intéressé.e.s, comme expliqué ici, parce qu’il n’y a pas l’idée d’un « trop ») :

J’ai repris ici le visuel de présentation de mon premier article, avec le titre « hypersensible » (my bad) MAIS j’ai aussi repris mon visuel et je l’ai actualisé suite aux partages de Saverio Tomasella, le « papa » du terme « hautement sensible », de l’Observatoire et de la Journée de la Sensibilité, pour la Quinzaine de la Sensibilité (mission actualisation, toujours), et là j’ai mis « haute sensibilité » : 

On reparlera de l’image des orchidées un peu plus tard, mais on voit déjà bien ici comment les personnalités hautement sensibles peuvent être submergées par leurs ressentis, leurs émotions et les diverses stimulations… Elles sont sans filtre, et par conséquent peuvent vite saturer et être victime de surcharge physique et/ou mentale (LE sujet à la mode parmi mes ateliers).

Appelons maintenant sur le devant de la scène ceux dont on parle le plus, et peut-être même un peu trop : les…

Haut Potentiel Intellectuel (HPI)

LA caractéristique unanimement reconnue est celle d’un Quotient Intellectuel (QI) supérieur ou égal à 130 sur l’échelle de Wechsler, mais ce n’est pas forcément SI simple, ou plutôt si uniforme, comme l’illustre la guéguerre autour du choix du mot sur l’étiquette : Haut Potentiel, Haut Potentiel Intellectuel, Douance, Philocognotifs, Zèbres, Emotifs Talentueux, surdoués complexes ou laminaires… c’est complexe, et on peut avoir des scores de QI hétérogènes ou le haut potentiel sera validé (ou non) par l’observateur plus que par le score. 

Ce qui est sûr c’est que personne n’aime le côté hiérarchisant de « sur-doué » : nous ne sommes pas plus doués que nos amis « normopensants », nous avons juste un fonctionnement légèrement différent, et une sensibilité chez certains sujet qui n’est pas sans rappeler la haute sensibilité :

L’hypersensibilité émotionnelle ne concerne pas forcément tous les surdoués (les laminaires ne vont pas forcément s’y retrouver), aussi on pourrait se demander si elle relève de la douance ou d’une haute sensibilité associée.

S’il est couramment admis que 10% des personnes hautement sensibles sont AUSSI haut potentiel, nous n’avons pas de consensus sur la réciproque (même si Alban me faisait remarquer que 10% de 30% faisant 3% ça aurait tendance à valider mathématiquement tous les surdoués – entre 2 & 5% de la population, mais on parle principalement de 3%).

Certain.e.s vont dire dans leurs ouvrages que tous les surdoués sont hautement sensibles, d’autres non, et quand on sait qu’en consultation on ne voit que les surdoués qui vont mal on pourrait s’interroger si ce n’est pas la combo haut potentiel et haute sensibilité qui favoriserait l’épuisement par surcharge émotionnelle et mentale, plus que la douance elle-même. C’est en tout cas mon interrogation quand je recoupe mes lectures de Saverio Tomasella et Nicolas Gauvrit 🧐 (« Hypersensibles », « Psychologie du Haut Potentiel » et « Dans la tête des HPI » – oui j’ai un peu potassé mon sujet pour la conférence, surtout la haute sensibilité que j’avais trop peu explorée).

Mais la différence ne se limite pas à une haute sensibilité ou un haut potentiel intellectuel (qui bien accueillis et accompagnés peuvent être de beaux atouts de réussite et de créativité), la neurodiversité inclut aussi des troubles, qui peuvent complexifier le quotidien, et demander encore un peu plus de suradapation (on reparlera de suradaptation rassure-toi, c’est LA problématique avec la différence, qui est une richesse par ailleurs) :

Trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA-H)

En voici une brève description, toujours superbement illustrée par notre amie Odette :

S’il y a moins de discussion autour du choix du nom, je ne suis personnellement pas forcément d’accord avec ce « trouble de l’attention » (je me permets d’en parler car je suis aussi concernée) : notre attention fonctionne très bien sur les sujets qui nous intéressent 😀 ! Par contre c’est plus difficile de rester concentrer sur des sujets imposés et/ou sur des longues périodes de temps… et pour les hyperactifs rester en place et immobile peut être compliqué, ce qui peut perturber les petits camarades (et les plus grands – j’ai envie d’offrir des fidgets à toutes celleux qui font en permanence clic-clic avec leurs stylos, il fallait que je le dise !)

Autre trouble(s), les :

Troubles DYS

Je parle beaucoup moins des troubles DYS, en j’en suis désolée (je les ai moins étudiés, même si j’ai mis des ressources et infos dans mon précédent article), mais ils sont nombreux, on peut les cumuler, et chaque trouble ajoute un degré de complexité sur les tâches qu’ils va impacter :

Imaginez jouer du violon avec des gants de boxe (si tu penses à Coluche on est de la même génération) : c’est le quotidien des dyspraxiques. Les dyslexiques ont de grosses difficulté de lecture, les dyscalculiques avec les maths, bref que des compétences attendues et évaluées dans la scolarité, qui s’avèrent pour ces profils beaucoup plus compliquées. Heureusement nous avons de nouveaux outils (notamment numériques – coucou Isabelle Alix) et des adaptations possibles pour les profils neuroatypiques (tiers-temps supplémentaires, travail sur ordi plutôt qu’avec un crayon…)

Qui dit troubles et difficultés dit nécessité de suradaptation pour effectuer des tâches qui n’auront pas de coût énergétique particulier, ou alors largement moindre, pour des normopendants ou des neurodivergents sans troubles DYS : la compensation des difficultés vient avec son coût énergétique particulier.

Enfin dernier profil, que je connais bien

Trouble du Spectre de l’Autisme

C’est le nouveau terme consacré pour recouvrir le continuum du spectre de l’autisme (avec ou sans déficit intellectuel), comme quoi cette notion de spectre et donc de continuum se retrouve dans plusieurs neuroatypies (c’est pareil avec le QI, c’est un continuum)… Ses caractéristiques :

Je souligne ici que nos difficultés d’empathie sont « cognitives » (difficulté à interpréter nos ressentis, on parle d’alexithymie, mais aussi déficit en théorie de l’esprit-comprendre ce qui ce joue chez l’autre) : certains autistes semblent ressentir très fort les émotions de leur interlocuteur, mais n’arriveront pas forcément à les verbaliser (de même que leurs émotions).

Pour être concernée (oui, aussi) par l’autisme c’est sûrement mon atypie qui m’amène le plus de difficultés, en coût d’adaptation sociale, difficultés à comprendre les attentes et implicites, à interagir avec fluidité (voire à interagir tout court) MAIS ça nourrit aussi mes capacités d’apprentissage et de partage sur mes intérêts spécifiques 🙂 

Tu l’auras compris maintenant : la neurodiversité est… diverse.

S’il n’y a effectivement que peu de degrés de différence entre un normopensant qui aurait des facilités à l’école et un surdoué laminaire (quelques points de QI peuvent seulement les séparer, même si c’est parfois plus), pour d’autres profils ce léger filtre devient un vrai gros décalage, souvent associé à du rejet, parfois même du harcèlement, et ce sentiment vraiment dérangeant de fonctionner différemment.

« Ni folles ni connes », dit Fabrice Micheau des filles et femmes surdouées et neuroatypiques multiples qui se sont longtemps (toujours ?) senties décalées : la remarque semble extrême mais elle est plus bienvenue, quand on a passé sa vie à ne pas se sentir intégrées

Et maintenant on fait quoi ?

On cherche ses étiquettes !

 

 

En quête d’étiquettes ?

Bien plus que des étiquettes, je pense qu’on cherche avant tout un mode d’emploi, SON mode d’emploi.
Et quand on s’est senti toute sa vie en décalage, et/ou avec des difficultés à réaliser des tâches qui semblaient simples à nos petits copains c’est LOIN d’être évident d’arriver à mettre des mots sur sa ou ses différences, si on n’a pas la chance de tomber sur des professionnels formés et informés. Alors on va explorer, chercher les pièces du puzzle, ses pièces de puzzle :

A chacun.e ses nuances, à chacun.e ses différences. 

Et au pays de la neurodiversité il est tout à fait possible, même si ce n’est pas la majorité, d’avoir plus d’une couleur à sa palette, ce qui peut accroître d’autant l’impression de décalage (où le réduire, un trouble peut en compenser un autre), et la difficulté à identifier ses propres particularités.

Parfois on découvre un terme et c’est une « révolution-révélation », comme dit Nathalie Alsteen : on comprend tout d’un coup son fonctionnement différent, on se sent enfin compris et accueilli, et après un travail de relecture du passé c’est TRES libérateur.

Mais parfois on a une première étiquette qui va éclairer certaines incompréhensions mais le décalage persiste, et parfois le mal-être aussi. On sent qu’il manque une pièce du puzzle, ou bien on se persuade d’avoir un problème ailleurs, et là la quête peut être beaucoup plus complexe pour arriver à trouver SES étiquettes à soi, les pièces de son mode d’emploi. 

Alors on va creuser, chercher, explorer, recouper les infos pour essayer de trouver SA nuance, sa couleur à soi, sa sensibilité.
Et si j’avais aussi des traits autistiques ? C’est normal de ressentir autant, aussi fort ? Et si j’étais bipolaire ? Schizophrène ? Complètement folle ?

Quand on en est à ce stade de nos interrogations ce n’est plus un filtre qu’il y a avec nos amis normopensants, c’est un décalage qui sera plus grand, plus épuisant, plus persistant, et on peut chercher looongtemps une combo de différences où il n’y aura pas forcément de mode d’emploi

 

Le continuum de la différence : du simple filtre au gouffre

Je vois la différence comme grand continuun, et je pense que non seulement nous sommes tous différents, et qu’étymologiquement nous sommes tous « multi-potentiels » sous réserve d’explorer ses intérêts et talents (et heureusement, pas d’idée de classement ici, juste de trouver sa place et révéler son potentiel).

MAIS si la frontière est fine entre « normopensants » (je n’aime pas trop le terme, mais je peux comprendre que « moldus » soit vexant, même affectueusement) et personnes plus sensibles (des normopensants un poil plus réactifs, mais on verra ici aussi que c’est un continuum), et/ou entre « normopensants » et « hauts potentiels » (encore plus « hauts potentiels laminaires« ), c’est parce qu’il n’y a ici à mon sens, et selon les travaux de Nicolas Gauvrit, que quelques degrés de différence 🤏 Un léger filtre.

On pourrait essayer de représenter ce continuum de différence ainsi entre « normopensants », personnes hautement sensibles et HPI ainsi :

Bien sûr c’est schématique, et sûrement loin d’être aussi linéaire (on aime bien parler d’arborescence, même si elle n’est pas réservée aux surdoués), mais ça montre que le côté progressif de la différence, d’un point de vue sensibilité à gauche et QI à droite de mon axe aléatoire de « différence » (ce n’est pas très rigoureux, mon axe représente autant la sensibilité au début que le QI à la fin, j’aurais du en faire deux…).

Ce que j’ai voulu illustrer ici c’est que les personnes hautement sensibles se sentent différentes et en décalage des normopensants de par le sensibilité, et les HPI aussi de par leur quotient intellectuel. Sauf qu’à l’intérieur même de la douance on a aussi des degrés de différence : si le décalage peut être réel mais au final assez léger et surtout très personnel avec un QI légèrement supérieur à 130, il sera beaucoup plus marqué pour ceux qu’on appelle les THPI (« très hauts potentiels intellectuels », QI supérieur à 145) et devient abyssal pour les TTHPI (« très très haut potentiel intellectuel ») et leur QI stratosphérique supérieur ou égal à 160. Ils peuvent être passionnants, mais gravitent sur une autre planète !

A titre personnel je constate régulièrement que je fais peur aux « simples HPI » (je mets les guillemets car pour moi c’est factuel et surtout non-jugeant, et surtout pas dans l’optique d’un quelconque classement), mais disons-le aussi la plupart des HPI me fatiguent, surtout quand ils sont en groupe, et mon masque adaptatif est constant, y compris auprès des « premiers degrés de neuroatypie ». Est-ce un autre niveau de QI, et/ou les conséquences de mes traits autistiques je ne suis pas sûre, mais j’ai clairement encore un bel espace de décalage quand je suis dans des groupes de HPI : il reste un filtre pour moi ici, et il n’est pas mince. C’est ce genre de ressenti qui m’a alertée sur la possibilité d’une autre étiquette à trouver 🙂 

On observe la même gradation avec la sensibilité, qui est aussi par essence un continuum (ou un curseur)

Je n’ai pas représenté ici les valeurs négatives, même si l’hyposensibilité existe (notamment chez des personnes dissociées ou très très suradaptées), mais on peut décrire la sensibilité comme étant un continuum d’une sensibilité dit « normale » à ce qu’on appelle la haute sensibilité ou l’ultrasensibilité, une sensibilité exacerbée qui caractérise les personnes hautement sensibles, que Saverio Tomasella qualifie joliment d' »extra-terriens ».

J’ai donc fait graviter nos amis hautement sensibles autour de nos amis « normopensants », en pensant très forts aux « Emotifs Talentueux » de mon amie Nathalie Alsteen (ça fait « E.T. » comme extra-terrestre », ou « extra-terrien »). A l’extrême de notre continuum il y a ce qui pourrait être qualifié de « trop » sensible, l’HYPER-sensibilité, celle où on peut être débordé par le trop de sensations et de sentiments, là où le curseur déborde.

On parle beaucoup de « surcharge mentale » dans le milieu de la stress-défense, mais la surcharge peut aussi être physique et/ou émotionnelle, et plus on cumule de surcharges plus on risque de s’épuiser, encore plus quand notre différence arrive avec des besoins spécifiques (et en réalité nous avons tous des besoins spécifiques).

Ces besoins vont aussi dépendre des éventuelles troubles neurodéveloppementaux associés… Si les hautement sensibles sont des extra-terriens, est-ce que les profils neuroatypiques multiples sont des extraterrestres ?!

Si on garde l’image des planètes, en prenant en compte tous les profils possibles ça ressemblerait à ça (je me suis bien amusée sur mes diapos)

Si on peut voir la sensibilité et l’intelligence comme des continuums ou des curseurs, qui seront propres à chacun, j’ai imaginé les divers profils de neurodivergences comme autant de planètes gravitant autour des « normopensants », chacun se sentant un peu différemment décalé et étranger en fonction de ses particularités.

La quête des étiquettes devient alors une quête d’alignement de planètes (c’est très astro-logique tout ça).

Bien sûr on peut avoir plusieurs planètes alignées sur notre « continuum de différence », notre « alignement planétaire personnel », et qui dit planètes qui s’alignent dit planètes qui peuvent se masquer…

De la même façon que 10% des hypersensibles sont aussi haut potentiel, 10% des TDAH sont également haut potentiel (et ils peuvent aussi être hautement sensibles, comme notre ami ici).

Ca peut être un avantage d’avoir deux planètes alignées, le HPI compensant les difficultés du TDAH au quotidien (on aurait alors la planète HPI devant la planète TDAH), mais on peut aussi complètement passer à côté de l’un ou de l’autre. Le TDAH peut perturber la passation du bilan de QI (WISC pour les enfants, WAIS pour les adultes, pour les plus fréquemment utilisés), et faire perdre quelques points, voire faire « rater » des parties de test par manque de concentration et/ou saturation. Une planète TDAH peut faire rater une planète HPI, elle lui fera en quelque sorte de l’ombre quand on passera les bilans, le trouble masquant le potentiel. Ca peut ne pas empêcher de s’épanouir, le HPI étant quand même présent et pouvant là aussi aider à l’adaptation du TDAH au quotidien.

La psychologue qui m’a fait mes bilans a clairement noté des moments où je décrochais, perdant des points au passage, à tel point qu’on ne sait pas vraiment si je suis HPI ou THPI, au-delà de mon sentiment de décalage avec les HPI… Par contre il a suffit d’un simple questionnaire sur le TDAH pour qu’on le valide chez moi, tellement je crevais le plafond ! (non seulement c’était une évidence pour mes proches, et pour moi aussi, à tel point qu’on n’a pas rajouté de bilan complet spécifique – c’est de la pièce de puzzle dont on a le plus besoin, pas forcément du tampon, à part peut-être pour pouvoir adapter une scolarité)

Et je n’ai pas les chiffres mais il est assez fréquent qu’un HPI compense un ou plusieurs troubles DYS aussi, ce qui peut masquer le trouble qui ne sera pas accompagné, mais aussi ressembler à une « norme » qui n’en est pas vraiment une et où en passera aussi à côté du HPI (et c’est dommage, c’est important de « nourrir » le HPI – j’ai bien dit nourrir et pas gaver, ce sera toujours en fonction des envies et besoins de chacun)
Il existe aussi des autistes autrefois dit « Asperger » ou « de haut niveau » qui vont cumuler l’autisme et le haut potentiel, et là aussi le haut potentiel peut compenser et masquer les traits autistiques, au point de le camoufler pendant des années, notamment dans le cas des femmes autistes suradaptées… 

On parle de « double exceptionnalité » quand la planète HPI s’aligne avec une ou plusieurs autres neuroatypies (ou un autre trouble, comme la surdité par exemple, ou une maladie chronique). Et une double exceptionnalité peut compter triple, comme mon « efferveScience compte triple » et sa trilogie de planètes (même si on parlera toujours de « double exceptionnalité », la « triple exceptionnalité » c’est quand on a une particularité de type socio-démographique ou de genre en plus, comme les personnes racisées ou LGBT+ avec double exceptionnalité par ailleurs)

C’est typiquement là où on va prendre conscience de degrés de différences supplémentaires : on sent qu’il reste un décalage, qu’il doit manquer d’autres pièces du puzzle (ou bien qu’on est vraiment un OPNI – Objet Pensant Non Identifié). Et c’est compliqué parce que si on parle déjà assez peu des doubles exceptionnalités « vraiment doubles » (comme la combo TDAH et HPI qu’on nomme parfois « guépards »), il n’y a quasiment rien sur les combo un peu plus « exotiques » et multiples.

On peut avoir l’impression de trouver LA clé avec la haute sensibilité, ou le haut potentiel, d’avoir trouvé sa tribu, mais passée l’épiphanie on sent qu’on ne fait pas encore vraiment partie du groupe, sans forcément vivre le même rejet qu’on a pu vivre avec les normopensants on peut ressentir encore du décalage, une forme d’incompréhension ou une surcharge. C’est là que le filtre peut devenir mur, ou gouffre, ou tout autre mot qui peut exprimer la perception de ces degrés de différence encore non identifiés qui fait que ta quête de je(u) n’est pas encore tout à fait terminée…

Et je n’ose même pas parler de l’errance diagnostique quand on a ce sentiment ancré de ne pas rentrer dans les cases, même les plus atypiques, et des possibles erreurs diagnostiques… 

De la même façon que la douance ne favorise pas l’existence d’un trouble associé (dépression, autre neuroatypie), elle ne l’exclut pas non plus, et on peut tout à fait cumuler sa douance, ou une autre neuroatypie, avec une autre maladie mentale, et/ou les cicatrices d’un vécu traumatique, avec là encore le risque de passer à côté de l’un ou de l’autre… 

Plutôt que de vouloir à tout prix coller les personnes en souffrance et en décalages dans les cases préformatées d’un DSM un peu daté, il serait bienvenu que les « psychistes », comme les appelle Saverio Tomasella, soient aussi formés à la neurodiversité, aux troubles neurodéveloppementaux, et aussi à l’impact du trauma sur leur émergence (un vaste sujet que j’ai tout juste commencé à explorer, à titre personnel et dans le cadre de mon travail sur la Théorie PolyVagale)… 

J’avais parlé dans un article chez Nathalie Alsteen des doutes et errances potentielles de la personne qui se sent différente (qui partait justement déjà d’un sentiment de décalage et d’épuisement auprès des personnes dites « normopensantes ») : il m’a fallu des années pour mettre l’étiquette HPI, pourtant évidente (j’étais le cliché de la bonne élève), et 37 ans pour rajouter l’autisme, après avoir mangé les étiquettes et surtout les traitements de la schizophrénie et de la bipolarité. D’ailleurs le doute persiste sur ma bipolarité, qui semble liée à des remontées traumatiques, mais pourrait aussi être plus fréquente chez les personnes dans le spectre de l’autisme (on trouve quelques données en ce sens, les métaétudes ne sont pas formelles mais c’est clairement un -autre- sujet à creuser)

Le point commun avec tous ses profils, qu’ils soient atypiques « simple » ou « multiples » : un décalage à combler pour mieux être accueilli, accepté et parfois juste compris, et c’est ce décalage qui sera d’autant plus épuisant à combler qu’il est important.

Gare à l’épuisement… 

 

Le coût énergétique de la différence : attention au « cope-out »

Quand on parle de physiologie du stress et du burn-out (ma première spécialité, autant dans la théorie que dans l’expérience), on parle de « Syndrome Général d’Adaptation« . 

Le stress est une réaction physiologique normale d’adaptation à un événement perçu comme stressant : c’est ce qu’on appelle la phase d’alarme, qu’on a longtemps réduit à la fuite, la lutte ou l’inhibition, avant de la compléter par la quête de soutien du Vagal Ventral avec la Théorie PolyVagale (qui est physiologiquement différente, le vagal ventral n’active pas la réaction de stress – la pile reste verte, l’évènement est  géré en confiance, sans être perçu comme un stress, pour être précise)

C’est normal de vivre des événements stressants, tant qu’ils restent ponctuels et pas trop intenses (à l’échelle de nos ressources).

Le problème est quand le stress devient chronique, et qu’on s’enferme dans la « phase de résistance », en permanence mobilisé pour gérer soit un ou plusieurs stress trop intenses, soit plein de petits stress répétés (des dragons trop gros pour nous, ou trop de petits dragons, comme j’aime dire en atelier). Ce sont cette intensité et/ou cette chronicité qui peuvent mener à l’épuisement, la dernière phase du « Syndrome Général d’Adaptation » :

On a l’habitude de présenter le burn-out comme un « trouble de l’adaptation ». Dans le sens « l’organisme n’a pas réussi à s’adapter ».
Je pense surtout que l’organisme burn-outé a chuté à force de se suradapter, avec toute l’intensité de son décalage.

Pour moi le burn-out est un « Syndrome Général de SURadaptation », ce que j’appelle la « neurosymophonie de la SURvie » (qui pour les profils hautement sensibles a tout de la cacophonie…). On va trop fort, trop vite, tout le temps, et ce n’est écologique pour personne.
Et j’ajouterai que même le burn-out a un rôle adaptatif : celui de nous forcer à nous arrêter pour nous reposer, plutôt que de finir avec un cancer ou un AVC, un cœur brisé (takotsubo) ou à l’extrême un décès au travail (karoshi-ce n’est pas un hasard si ces termes viennent du japon, pays de surinvestis s’il en est). Le burn-out est un malaise vagal sur un temps long, avec la même intention de préservation.

J’ai l’habitude de dire quel le burn-out n’est pas qu’un syndrome (de suradaptation), il est surtout le symptôme d’une société qui va trop vite, au détriment des besoins humains, de notre écologie et du respect de notre énergie.

Il est illusoire d’espérer être en permanence mobilisé et dans l’action, nous avons besoin de moments de repos et de ressourcement, plutôt que de se perdre jusqu’à s’oublier et à s’épuiser pour répondre à cette injonction permanente à la SuperFormance qui fait notre « génération Stormtroopers » coupée de ses émotions et de ses besoins :

 
Profites-en c’est à l’époque où je faisais encore des vidéos de 30 minutes !
Pour en savoir plus RDV dans l’article associé

Le premier problème ici c’est que les injonctions et attentes sont bien souvent des objectifs irréalisables (comme cette injonction d’être en permanence dans la SuperFormance sympathique, quand on a aussi besoin de repos dorsal), mais aussi qu’elles ne prennent pas en compte le fait que nous avons tous des ressources, et notamment une capacité de résilience, qui est propre à chacun.e.

Il y a là encore un continuum, celui de l’adaptation, décrit par de Dr Thomas Boyle et repris par Saverio Tomasella : on distingue trois types de profils, symbolisés par trois fleurs, qui vont différer par leurs niveaux de résilience et de sensibilité. Comme j’aime bien les jeux vidéos je t’ai fait un joli visuel avec des fleurs et leurs curseurs : 

Les enfants pissenlit sont très résilients, ils peuvent basiquement pousser partout, ils sont super adaptables, mais moins sensibles que les autres.
Les enfants tulipe (qui deviendront des adultes tulipes) sont un peu moins adaptables mais plus sensibles, ils ont besoin d’un environnement bénéfique où pousser, un pot de fleur pas trop enfermant mais suffisamment nourrissant.
Quant aux enfant orchidée, ils sont hautement sensibles (d’une sensibilité dite avantageuse) mais très peu résilients : ils ont besoin de leur environnement adapté, avec la bonne terre et un tuteur pour s’épanouir sans s’épuiser, et s’ils sont remarqués pour leur beauté ils ont aussi des besoins très spécifiques pour parvenir à s’épanouir.

(une réflexion en passant : si on peut penser que les pissenlits sont les plus adaptés en terme de survivalisme on notera que les pissenlits on les mange, tandis que les orchidées on les offre – les tulipe aussi ont les offre mais on les coupe pour ça, l’histoire ne finit pas bien non plus… je n’ai pas de conclusion c’est juste un constat en passant) 

Le problème c’est que les attentes et injonctions sont telles qu’ont demande à tout le monde d’être des pissenlits suradaptables, capables de superformer au milieu du stress et de l’incertitude, un contexte qui n’est pas adapté aux profils les plus sensibles et à leurs besoins spécifiques. Dans ce continuum de fleurs il faut alors prendre conscience que moins on est adaptable, et plus on est sensible, plus l’effort de suradaptation sera intense et donc coûteux pour répondre à des attentes qui ne sont profondément pas écologiques pour nos pauvres orchidées suradaptées en terrain hostile. 

C’est pourquoi on observera les orchidées tomber en premier, subissant ce que la regrettée Cécile Bost appelait le « cope-out », un « burn-out » de suradaptation, dont le paroxysme est le plus spécifique « burn-out autistique ».

Les signaux sont les mêmes que ceux du burn-out, mais le terme a le mérite de souligner le coût énergétique de la suradaptation, et la notion de « dépersonnalisation » ou « zombification » prend un tout autre sens quand on considère l’énergie demandée pour entretenir le « faux-self de normalité » des personnalités neurodivergentes : 

Quand je parle dans mes partages du « sentiment de décalage » qui nourrit l’épuisement des HPI et personnes hautement sensibles (même si ne sont pas les seules victimes de burn-out, on est bien d’accord), il y a des profils pour lesquels la vision du monde et l’effort de suradaptation est bien plus décalé sur le continuum de la différence, et celui de l’adaptation, qu’elle ne le serait pour un « simple HPI laminaire » versus un « normopensant ».

Si chaque neurodivergence vient avec son coût énergétique dans l’intensité accrue de son faux-self, le quotidien des personnes multiplement atypies, et/ou hypersensibles (d’une sensibilité relevant du trop, de la pathologie) est potentiellement encore plus décalé et donc coûteux : étant peut-être THPI, assurément autiste, très clairement TDAH et potentiellement bipolaire il n’y pas un filtre entre nous, il y a un goufre, et ce clivage est pour moi réel et très coûteux au quotidien dans certaines situations sociales notamment (comme le dit si bien Josef Schovanec on n’est pas autiste quand on est tout seul).

Ce n’est je pense pas pour rien qu’il y a autant de maladies inflammatoires et/ou auto-immunes chez les personnes hautement sensibles, qui sont souffrantes parfois avec un bilan biologique classique déclaré comme « normal », la norme ne prenant pas en compte les personnes les plus sensibles (quand en médecine fonctionnelle on va parler de « valeurs optimales de sante » qui sont des seuils abaissés de valeur santé dont les personnes hautement sensibles pourraient bien être le point de repère, voire la future norme – autre sujet à explorer, je manque de temps !)

Le terme de « cope-out » proposé par Cécile Bost peut avoir le même effet révélateur d’un décalage que peuvent l’avoir les différentes étiquettes de neurodivergence, dans la prise de conscience d’un sentiment profondément ancré de décalage et d’un effort bien souvent inconscient de suradaptation. C’est d’ailleurs le terme de « burn-out autistique » (qui n’existait hélas pas à l’époque de mes burn-out) qui m’a fait réaliser que si je continuais à collectionner les burn-out malgré ma maîtrise physiologique du sujet il y avait peut-être d’autres facteurs de risque à explorer… (même si je te rassure tu n’as pas forcément besoin d’être autiste pour faire un ou plusieurs burn-out – le gros travail de fond étant d’ailleurs le même, avec ou sans neuroatypies, sur l’écoute de soi, les besoins et limites, et l’estime de soi aussi, et ça quel que soit son profil)

Mais comment peut-on en arriver à se suradapter au point même d’oublier qu’on s’est coupé de son corps et de ses ressentis, dans le déni de ses ressentis et de ses atypies ?

J’ai une théorie, et oui : elle est polyvagale 🙂 
(je ne pouvais pas ne pas en parler)

 

Déni d’atypies mode d’emploi : une théorie… polyvagale

Nous avons un besoin vital de connexion pour survivre : le bébé vient au monde dépendant de ses figures parentales pour survivre. Il doit être accueilli, aimé, sécurisé et nourri pour se développer dans l’harmonie et la sécurité, et c’est hélas loin d’être tout le temps le cas, encore plus quand on n’est pas accueilli dans sa différence.

Croisons la théorie de l’attachement de Bowlby et la Théorie PolyVagale de Porges :

Nous venons au monde câblés pour le lien, mais en fonction de l’attachement perçu dans notre enfance, de sa sécurité validante ou d’une perception d’ambivalence ou d’évitement va dépendre notre mode d’adaptation (voire de suradaptation) par défaut. 

L’enfant est prêt à tout pour être accueilli et validé, c’est pourquoi il remettra en cause sa valeur face à des figures parentales ambivalentes (cherchant le bon comportement pour être accepté, quitte à se suradapter), et pourra s’isoler quand il perçoit ses figures parentales comme évidentes (et donc ni aimantes ni accueillantes).

De ces tendances d’adaptation découleront le faux-self qui sera privilégié par ces enfants suradaptés : 

On aura d’un côté un faux-self à dominante vagale dorsale plutôt figé et immobilisé que Saverio Tomasella associe à l’éléphant (on parle aussi de faux-self de type robot), et de l’autre un faux-self de suradaptation permanente, où on est prêt à tout faire pour se faire accepter : ce sont les caméléons, prêts à tous les efforts pour être accepté par le groupe.
Les blessures de l’âme de Lise Bourbeau (qui sont au final aussi des blessures de l’enfance) peuvent aussi intervenir, d’ailleurs il est intéressant de noter qu’elle associe chaque blessure à un masque, et donc une forme de faux-self, même si j’ai moins creusé ses écrits.

En réalité on peut alterner le faux-self de type robot/éléphant et le faux-self de type caméléon, et même bloquer dans un état intermédiaire entre immobilisation et suradaptation, dorsal et sympathique, l’état de figement de défense que connaissent bien les profils atypiques : 

L’état de figement de défense est un mécanisme d’adaptation qui même le figement dorsal (principalement physique, on n’ose plus bouger) et une forme d’activation sympathique qui peut être des tensions corporelles et/ou la persistance d’une forme d’agitation mentale dans l’immobilisation corporelle, que connaissent souvent bien les profils efferveScients.

Le visuel est ici très parlant : on a cette armure de protection dorsale et probablement des ressentis aussi actifs et volatils que les oiseaux autour de notre « chavalière » suradaptée, dans une dynamique de préservation et de survie, un parfait « figement de défense »

Comme je le dis tout le temps quand je parle de Théorie PolyVagale : tous les états sont OK et là pour nous préserver, mais on devra valider que les états sont appropriés à la situation (par l’interocéption), et idéalement ne pas s’enfermer dans un état subi chronique (qui peut traduire un vécu traumatique, et/ou une suradaptation étouffante, ou bien une des caractéristiques d’un trouble neurodéveloppemental qui viendrait impacter notre système nerveux)

On peut complètement être en mode éléphant pour se ressourcer (ou un autre animal, choisis ton totem dorsal) et en caméléon pour passer à l’action, du moment qu’on ne s’enferme ni dans l’un ni dans l’autre, et qu’on créé et préserve un espace de ressourcement : 

Tout est une question d’équilibre, et nous avons besoin de nourrir nos besoins spécifiques par nos activités ressourçantes, qui seront propres à chacun.e. L’avantage c’est que pour les profils hautement sensibles la connexion n’est pas coupée avec le corps (même si elle peut avoir été étouffée) : c’est une facilité pour décoder nos messages internes de satisfaction ou de tension, et réajuster nos activités pour se ressourcer et mieux déployer ses talents différents.

Et si l’avenir appartenant aux personnes hautement sensibles ? 

 

De canaris à colibris : demain tous sensibles ?

Nous avons tous tous les états en nous, et l’objectif et de les nourrir et de les équilibrer en fonction de nos besoins spécifiques et de façon adaptée à notre environnement et nos envies.

Les profils hautement sensibles en particulier ont cette capacité à reconnecter à leurs ressentis intenses et au pouvoir de connexion du vagal ventral, cet état de bien-être et de sérénité qui peut participer à nous ressourcer, quand on y a accès.

Les personnes hautement sensibles sont les canaris dans les mines, les détecteurs des tensions et dissonances qui risquent de participer à leur épuisement. Ils n’ont pas de filtre, il ne peuvent pas ne pas ressentir quand un environnement de travail dysfonctionne, que leurs besoins et valeurs ne sont pas respectés, ou qu’on tente de les harceler ou de les manipuler. Ils sont les soupapes qui vont hélas sauter en premier, mais aussi potentiellement les personnes à qui on va le plus reprocher leur sensibilité et/ou leur incapacité à « jouer le jeu », ce qui participe à renforcer d’autant un effort de suradaptation déjà trop coûteux.

Quand j’ai longtemps répété que les haut potentiel étaient les premiers à tomber en entreprise, connectés qu’ils étaient à leurs ressentis et valeurs et comment elles pouvaient ne pas être respectés (notamment la valeur justice, et le besoin de sens), je m’interroge aujourd’hui si ce n’est pas la part hautement sensible des profils à haut potentiel qui participe à en faire les premières personnes à s’épuiser, plus que le fonctionnement intellectuel particulier. Avis bienvenus en commentaires 🙂
(peut-être aussi que ce sont juste des traits communs aux deux profils, des planètes qui se ressemblent et donc vont peut-être s’assembler plus facilement ?)

Ce que je constate en tout cas c’est que la quête d’équilibre et d’une nouvelle écologie passe bien plus par la reconnexion à son corps, ses messages, besoins et émotions (et donc sa sensibilité) que par une réflexion uniquement intellectuelle.
Nous avons besoin des deux, et la voie de la reconnexion à soi et aux autres est justement la voie vagale ventrale, à laquelle la plupart des enfants hautement sensibles sont restés connectés. 

Et si la vraie quête n’étaient pas de modéliser des héros SuperFormants mais plutôt de reconnecter à l’enfant en soi, ses besoins et talents, et l’accueillir dans sa sensibilité et sa différence ? 

On observe avec la TPV, dans les milieu du coaching et de la préparation mentale, à une injonction à « renforcer son nerf vague », cultiver toujours plus de résilience et de suradaptation jusqu’à devenir « antifragiles » : c’est une quête qui peut faire sens pour des sportifs de haut niveau, qui vont rechercher la compétition et la SuperFormance, et auront des besoins particuliers de préparation et de récupération, mais ce n’est pas le propos des fondateurs de la Théorie PolyVagale, Stephen Porges qui l’a formalisée et Deb Dana qui l’a transmise.

Pas besoin de marcher sur les braises ou de bains glacés pour se sentir exister (même si parfois les personnes sont tellement dissociées et déconnectées qu’elles auront besoin de ces extrêmes pour juste ressentir quelque chose, mais c’est déjà une forme de dérèglement du système nerveux) : en vrai nous avons « juste » besoin de reconnecter avec nos corps et ses ressentis, le truc sous nos cerveaux dont on s’est tellement coupés des besoins qu’on l’a laisser s’épuiser (et nous avec, quand la monture s’effondre le cavalier tombe aussi), ou au point qu’il se retourne contre nous avec des maladies inflammatoires et auto-immunes.

Et ça, les personnes hautement sensibles savent déjà faire : elles sont gardé ce super-pouvoir de connexion à leur ressentis, même si c’est parfois un peu trop intense.

C’est à la fois simple mais pas facile de reconnecter à soi et à sa sensibilité, encore plus quand on a passé une vie à se suradapter et à se couper de tout et surtout de soi pour n’être ni rejeté ni harcelé (sans que ça suffise forcément), mais ce qui est sur c’est que c’est profondément doux et bienveillant : 

Nous venons au monde câblés pour le lien, et d’après Saverio Tomasella nous venons tous au monde en étant sensibles, voire hautement sensibles : grandement dépendants et intimement connectés à notre figure maternelle en premier lieu, et à nos figures parentales. Puis on se coupe de nos ressentis pour rentrer dans le moule de l’éducation et ses injonctions à ne plus ressentir et à masquer nos émotions, et ou s’oublie jusqu’à s’épuiser, ce qui n’est bien sûr pas ok.

Nous avons besoin de (re)créer un lien d’attachement sécurisé avec une figure d’attachement (pas forcément parentale) pour ressentir son accueil et sa sécurité : ça peut être soi avec soi quand on a encore accès à son vagal ventral (et là je recommande « Ancré » de Deb Dana), éventuellement avec l’aide d’un coach (ou avec mon livre « Le POWER du Je(u)« ), ou via la thérapie quand on a besoin de recréer une sécurité étouffée par trop de rejet et de suradaptation (et là l’Intelligence Relationnelle, qui couple TPV, Internal Family System et métacognition est très bien).

C’est une quête de soi, une quête de sécurité en soi et avec les autres, ça peut être long, mais c’est profondément doux et bienveillant : Deb Dana parle de « façonner en douceur le système nerveux », d' »étirer sans stresser » son système nerveux, d’accordage entre soi et une personne sécuritaire (proche ou thérapeute) : pas besoin de « sortir de sa zone de confort » (si c’est une envie c’est ok, si c’est un besoin c’est peut-être que la zone en question n’est pas si confortable que ça), pas besoin de braises ou de bain glacés, juste de douceur et de sécurité, suffisamment pour créer des espaces où tomber le masque. 

Retrouver une sécurité en soi et avec les autres, voilà qui peut être un vrai challenge quand on s’est toujours senti différent et qu’on a été rejeté pour sa différence, au point de se couper de ses ressentis, de son corps et de ses sentiments. On retrouve notamment ces injonctions dans la Reine des Neiges, à qui on demande de cacher ses émotions et sentiments, mais aussi ses ressentis corporels (« cache tes pouvoirs », « ne ressens pas »), avec en bonus le rejet et l’isolement (Elsa finit cloîtrée dans sa chambre), jusqu’à craquer et exploser en burn-out ou ici « cope-out ». 

Non seulement Elsa ne peut pas ne pas ressentir, mais elle ne peut pas non plus masquer en permanence son pouvoir ni ses émotions, au risque de finir en burn-out, ou ici « ice-out », la version glacée du cope-out.

Sa mission : reconnecter à ses ressentis, mais aussi libérer-délivrer ses talents spécifiques et aussi l’enfant en elle, Olaf :

 
Pour en savoir plus et libérer ses bonhommes de neige RDV dans l’article

A chacun de trouver son ou ses éléments et ses talents, pour les partager et les révéler au monde, et ça commence par reconnecter et délivrer l’enfant intérieur en soi et retrouver sérénité et harmonie intérieures pour lui laisser un espace d’expression (c’est ce que je te souhaite pour cette nouvelle année)

Le parent nourricier c’est celui qui prend soin de l’enfant intérieur, par opposition au parent normatif qui va tout faire pour faire entendre ses injonctions au risque parfois de tuer l’enfant en soi. Nous avons besoin des trois états de l’analyse transactionnelle, comme nous avons besoin des trois états de la TPV quand ils sont adaptés, d’autant plus qu’ils vont nous montrer la voie. 

La quête de je(u) commence toujours par une phase d’observation et d’écoute de soi, et là les états comme les messages du corps, ou ceux de notre enfant intérieur, pourront montrer la voie : 

Nous avons tous en nous une mélodie intérieure qui dépend de la régulation de notre système nerveux (principalement, mais elle est aussi inspirée par nos vécus passés).

Les personnes hautement sensibles sont nativement connectés à cette musique intérieure, bien souvent cacophonique et trop rapide dans notre monde actuel, avec sa « neurosymphonie de la SURvie« , mais sont aussi la voie et le diapason à suivre pour retrouver une meilleure harmonie individuelle et collective. 

Cette quêtte commence avec toi : quelle est ta fleur ? Quels sont ses besoins spécifiques ? Son terrain de je(u) ?

Il n’est plus possible aujourd’hui de continuer à s’épuiser à gommer sa particularité pour mieux être intégrer dans une norme qui n’existe pas vraiment, nous avons besoin de nourrir nos besoins spécifiques et nos talents différents (nous ne sommes pas tous des pissenlits…).

Un petit film juste parfait pour l’illustrer :

 

On voit bien ici ce qu’est un faux-self au quotidien, combien il est difficile de s’y enfermer, et coûteux de l’entretenir, alors qu’au fond « nobody is normal », personne n’est normal.

Je ne suis pas différent de toi, je suis différent comme toi.
Source inconnue

Même si les degrés de décalage peuvent varier le problème n’est pas dans la sensibilité ou la diversité, le problème est dans la norme et cette illusion que nous pourrions tous rentrer dans une même case, un unisson, ou un uniforme. 

La recette du bonheur existe, mais elle est personnelle et dépendante de nos envies et besoins spécifiques, avec ou sans neurodivergences.
La quête de je(u) est autant identitaire qu’énergétique, et résolument collaborative. 

 

Une quête de je(u) collaborative 

J’ai l’intime conviction que dans notre monde suradapté aux injonctions constantes et permanentes de SuperFormance la haute sensibilité va devenir la norme, et nos potentiels multiples seront de mieux en mieux accueillis, parce qu’on sera sorti de ce « mythe de la normalité » dont parle Gabor Maté.
C’est en tout cas en cours : on voit bien aujourd’hui combien de personnes s’épuisent à entretenir la façade d’un immeuble qui crame, et n’ont plus le choix après un ou plusieurs burn-out que de reconnecter à leur besoins spécifiques et à leur sensibilité retrouvée. 

Appartenir à un groupe n’est pas s’effacer, c’est juste mettre en commun ses talents spécifiques pour mieux avancer ensemble; plutôt que de s’épuiser à se suradapter en étouffant ses particularités. Mais ça implique de rester à l’écoute de ses besoins :

Il est temps de prendre conscience que c’est en arrêtant de toujours forcer et de toujours faire qu’on pourra ralentir collectivement et (re)trouver un rythme plus écologique, notre rythme propre à chacun, autant pour nous que pour notre planète.

On récolte ce que l’on s’aime : 

Notre quête à tous pour contribuer sans s’épuiser est de trouver notre mode d’emploi particulier, celui de l’alignement de nos planètes, de notre profil neurodivergent particulier. Ce n’est qu’en préservant et cultivant notre énergie qu’on sera en mesure de contribuer.

C’est un peu comme réussir à attraper et collectionner SES Pokéballs, et découvrir les besoins de SES pokémons pour leur permettre de grandir et de s’épanouir (on oublie la partie combats, je n’aime pas les combats) :

Tout est une question d’équilibre et d’énergie, quelque soit notre profil, qu’il soit dit « normal » ou divergent : nous avons TOUS besoin d’être au clair ce qui est ressourçant et vampirisant pour nous, et cultiver le ressourçant, c’est LA base de la stress-défense telle que je la transmets dans mes accompagnements et formations.

Et qu’on soit normopensant ou neurodivergent nous n’avons pas tous les mêmes ressources, ni les mêmes coûts énergétiques, tout dépendra de nos particularités et leurs impacts énergétiques, de « notre fleur à nous », mais aussi du contexte, de notre environnement et de notre état du moment : 

Et comme nous l’évoquions récemment avec Jessica Save-Pedebos, qui accompagne les jeunes profils neuroatypiques : on va avoir des besoins spécifiques propres à nos profils, qui pourront certes surprendre les normopensants, mais aussi rassurer les profils les plus atypiques.

Par exemple mon TDAH fait que j’ai principalement un repos actif et créatif, avec une dose de sympathique, quand mon TSA va nécessiter des bulles sans gens dedans, pour me ressourcer. Et peut-être que d’autres se ressourceront dans le lien à l’autre, et dans un repos plus passif, et c’est ok aussi. 

Pour explorer les besoins spécifiques des profils neuroatypiques avec Jessica : 

 
Plus d’infos et de ressources visuelles (dont tes cartes TPV personnalisées avec tes « étAnimaux ») dans l’article

La Théorie PolyVagale est une clé de lecture de notre degré de suradaptation, mais aussi un moyen d’identifier nos besoins spécifiques et les outils associés (en observant l’impact des outils sur nos états ont saura à quel point ils ont ou non adaptés pour nous), et ça tombe bien le panel des outils est quasi infini, et commence dans tes activités ressourçantes, qui te donneront l’énergie et la confiance nécessaires pour révéler tes talents.

Pour les besoins c’est simple : active ton parent nourricier, celui qui prendra soin de ton enfant intérieur, en lui demandant quelle est la chose la plus gentille que tu peux faire pour toi aujourd’hui (et autorise-toi à te l’offrir – peut-être la partie la plus challengeante), quant au « jeu » et à la révélation de tes talents en plus de mon outil chouchou l’Ikigai tu peux aussi et plus simplement chercher ce qui te met des étoiles dans les yeux :

D’ailleurs en parlant d’étoile(s) si tu es arrivé.e jusque-là je te recommande de bloquer une autre soirée pour regarder mon analyse polyvagAlchimique de WISH, le dernier Disney, et révéler ton ou tes étoiles (tes étoiles en vrai, nous sommes tous multi-potentiels) :

 
(un exemple de vidéo hors des cases qui fera peur aux normopensants mais peut inspirer les neurodivergents)
Plus d’infos et de visuels dans l’article associé

Je pense que l’épidémie de burn-out est une invitation à ralentir et à se reconnecter à sa sensibilité pour mieux se préserver et mieux révéler de façon écologique ses talents spécifiques, en reconnectant autant à ses envies et besoins qu’à ce qui nous inspire et nous anime.

Comme le confinement nous a obligés à ralentir (et la planète a apprécié), paradoxalement il nous a aussi invité à tomber les masques (ceux que les normopensants ont eu l’air de découvrir, mais que nous neurodivergents connaissions déjà très bien)
C’est vrai que c’est compliqué de porter un masque, on a l’impression d’étouffer, de moins bien respirer, de faire trop d’efforts pour les autres : et oui, on connait bien ça quand on a vécu sa vie en décalage, et qu’on s’est oublié pour se fondre dans une norme qui n’est pas écologique pour nous.

Nous jouons tous à notre niveau le jeu du « parfait travailleur », avec une dose d’effort qui dépendra de notre profil, mais nous sommes nombreux aussi, burn-outés et/ou nouvelles générations, à ne plus vouloir jouer selon les règles de la SuperFormance et de l’oubli de soi, et c’est tant mieux ! Parce que c’est trop coûteux de faire semblant, encore plus quand on a déjà une armure d’immobilité de figement et son faux-self de normalité.

Certes je continue à faire peur à beaucoup de normopensants, mais j’ai créé ma bulle d’expression où je peux tomber les masques et m’amuser à mon rythme et selon mes talents et envie, et je t’invite+++ à faire de même, créer ton univert, ton terrain de je(u) :

Ce joli texte qui m’a été offert par Bertrand « HarmoChopin » Carbonneaux m’a fait réaliser qu’il n’y avait qu’une lettre entre « autiste » et « artiste » (et d’ailleurs je ne fais pas peur aux artistes), mais même s’il y a un gouffre entre moi et les normopensants rien ne m’empêche de m’amuser sur ma planète efferveSciente, même si j’écris des articles trop longs et que je parle trop vite : les normopensants ne me liront pas forcément jusqu’au bout, mais ils peuvent s’ils le souhaitent ralentir mes vidéos (j’accélère bien les leurs, chacun peut faire un effort). Certes c’est potentiellement filtrant, mais ça me va bien de travailler principalement avec des profils neurodivergents, et surtout ça peut être libérateur et montrer qu’on peut créer et partager dans le respect de ses particularités 👽

A une autre époque, on m’aurait brûlée. 
(parce que femme, si ça se trouve j’aurais été un mec on aurait crié au génie – entre sujet encore)
Je ne me sens pas encore complètement en sécurité, encore plus après mes épisodes de bipolarité où on m’a internée et sédatée (j’ai l’impression que les psychistes préfèrent dissocier les gens que les libérer de leurs traumas, peut-être parce que ça dépasse leurs compétences – ils devraient explorer la TPV…), MAIS je me sens libre d’explorer et partager, d’infuser et de diffuser, de transmettre et d’informer, et pour ça aussi nous sommes doués !

Chacun et chacune pourra créer son univert (l’infini et au-delà bien sûr), pas forcément public bien sûr, mais surtout qui n’est pas forcément UNE seule case, mais peut être une parcelle de terrain de je(u) ou déployer son haut potentiel et ses projets et talents multiples, autant pour soi que pour montrer la voie à celleux qui forcent et s’épuisent à entrer dans des cases qui ne leur conviennent pas.

Libérons les enfants intérieurs ! Libérons notre sensibilité ! Libérons les orchidées, et toute la diversité de notre espèce humaine ! 
Comment pouvons-nous croire qu’il n’y a qu’une norme unique, quand on voit la diversité des fleurs et d’à peu près toutes les espèces qui nous entourent ? Comment créer ensemble une symphonie si nous sommes tous des « la », au diapason d’une normalité qui est une insulte à la beauté et à la richesse de la diversité ?

Nous sommes beaucoup à nous battre pour nos différences, que ce soit avec le #BlackLivesMatter ou le mouvement LGBTQIA+.
Je soutiens tous les combats, mais je n’ai plus la force en encore moins l’envie de me battre, encore plus pour des différences invisibles

J’ai juste envie de croire qu’un jour la différence ne sera plus un sujet mais une richesse, et qu’au lieu de lutter nous pourrons nous unir, et créer ensemble la plus belle symphonie, c’est de la diversité sous toutes ses formes et du jeu collaboratif, dans toutes les nuances de nos différences.

Alors seulement nous pourrons enfin revendiquer et incarner ce qui devrait être une évidence : #AllLivesMatter

Je ne suis pas différente de toi, je suis différente comme toi, et le monde a besoin de nos talents différents :

Sandra Boré, Science Witch 🧪🧙‍♀️🧬
Guerrière, Phénix & Messagère ✨
(et atypique multiple 👽)